
La Cour supérieure du Québec a tranché vendredi : un enfant doit légalement pouvoir avoir plus de deux parents. Dans la décision qu’il a rendue, le juge Andres C. Garin accorde un délai d’un an au gouvernement du Québec pour modifier la loi afin de permettre à plus de deux personnes d’inscrire leur nom sur un même certificat de naissance...
Au Québec, le gouvernement limite présentement à deux le nombre de parents déclarés légalement pour un enfant, en se fondant sur son interprétation du Code civil. Pourtant, des projets parentaux sont convenus à plus de deux adultes. Les enfants issus de ces familles vivent sans la protection légale qui leur est due puisque certains de leurs parents n’ont pas les mêmes droits et obligations envers eux.
Trois familles du Québec, chacune composée de trois adultes agissant comme parents, ont porté cette cause devant les tribunaux. Dans les trois cas, le juge Garin estime que de limiter la filiation à deux parents va à l’encontre de la Charte canadienne des droits et libertés. Il donne au gouvernement du Québec 12 mois pour rédiger des réponses, amender la loi en conséquence et créer un nouveau régime de filiation.
Par voie de communiqué, la Coalition des familles LGBT+ dit accueillir avec grande joie ce jugement rendu le vendredi 25 avril en faveur de la pluriparenté. « C’est un jugement historique!», déclare Mona Greenbaum, fondatrice et codirectrice générale de la Coalition des familles LGBT+.
-«Comme en 2002, lorsque nous avons fait reconnaître les droits des parents de même genre. Ce jugement affirme ce que nous avons toujours su : les familles se forment de différentes façons et toutes méritent la même reconnaissance, la même protection et la même dignité. »
La Coalition se dit fière d’avoir travaillé sans relâche avec des familles et les cabinets McCarthy Tétrault et Norton Rose Fulbright (qui l’ont fait pro-bono) afin de faire reconnaître les inégalités vécues par les familles pluriparentales québécoises.
-«La reconnaissance légale de la pluriparenté permettra aussi, nous l’espérons, la reconnaissance sociale de ces familles, comme elle a largement aidé celle des familles homoparentales» écrit-on dans le communiqué de la Coalition des familles LGBT+. «Elle permettra aux parents et aux enfants de vivre pleinement leur réalité familiale dans la dignité, sans honte et sans tabou.»
Qu’est-ce que la filiation ?
La filiation est le lien juridique qui unit un enfant à un parent. Il vient avec des droits et des obligations, telles que de voir à son bien-être, à son éducation et à sa santé. Le lien de filiation se crée lorsqu’une personne met son nom sur un certificat de naissance. Dans le cas d’une adoption, le lien se fait lorsqu’un tribunal prononce l’adoption. À l’heure actuelle, le régime de la filiation prévu par le Code civil du Québec ne reconnaît pas la possibilité d’avoir plus de deux parents légaux. Cette limite, selon le juge Garin, porte atteinte au droit à l’égalité garanti par la Charte canadienne des droits et libertés.
Impact du jugement et la suite des choses
Comme l’explique le juge dans sa décision, le Code civil du Québec « n’interdit pas formellement plus de deux liens de filiation », mais « aucune disposition du Code n’y donne explicitement son ouverture et son économie générale y fait plutôt clairement obstacle.»
- «C’est d’ailleurs la conclusion à laquelle arrive la jurisprudence», écrit le juge. «En effet, à plusieurs reprises, les tribunaux mentionnent spontanément, quoique dans des contextes différents, qu’un enfant ne peut avoir que deux parents en droit québécois », est-il écrit.
Dans l’immédiat, la situation des trois familles – ou de celles qui se trouvent dans le même cas – ne change donc pas. Pour que le jugement ait une incidence concrète, le Code civil devra d’abord être modifié.
Mais encore une fois, il est possible que la Cour d’appel, voire la Cour suprême, soit appelée à confirmer ou à invalider la décision de la Cour supérieure.
- «"Nous prendrons le temps d’analyser le jugement et n’émettrons aucun commentaire pour le moment"», a déclaré Elisabeth Gosselin, directrice adjointe du cabinet du ministre de la Justice du Québec.
Ce n’est pas la première fois que la cause de la pluriparentalité est portée devant les tribunaux au Canada. Ceux de l’Ontario, de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Colombie-Britannique ont déjà été saisis d’affaires similaires. Dans les trois cas, les juges ont tranché qu’il était dans l’intérêt des enfants en cause de reconnaître leur famille triparentale devant la loi."
Source ►fugues.com- 28/04/2025
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